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Ky Rann
Le lendemain matin, Garouk fut le premier debout, comme d'habitude, mais Jillian ne tarda pas à se lever, elle aussi, pour préparer le petit déjeuner tout en mettant sa bouilloire sur le feu. Ivrian était allongée contre Kylian, sur le dos, et fixait d'un air boudeur les cimes enneigées qui semblaient la narguer au-dessus de sa tête. Kylian avait un bras passé autour de son cou et son visage était appuyé contre son épaule. Elle se dégagea doucement, remonta les couvertures jusque sous son menton et vint aider Jillian. Elle coupa les tranches de pain tandis que Jillian sortait le jambon. Peu à peu, les autres émergèrent de leur sommeil et tous vinrent s'asseoir autour du feu. Ivrian tenait la tête obstinément baissée et Kylian ne la regardait pas. On aurait même dit qu'il évitait de poser les yeux sur elle.
- Où en sommes-nous ? s'informa Gorneval.
- A la moitié du trajet. Nous devrions être à Ky Rann dans quinze jours à peu près, répondit Kylian en mâchant consciencieusement son pain et son jambon.
Il mordit ensuite dans le morceau de fromage qu'il tenait dans l'autre main, puis ajouta :
- Peut-être que l'un de nous devrait partir en éclaireur avertir de notre arrivée. Certains n'aiment pas les surprises.
- Nous n'avons pas le choix, Kylian, dit fermement Jillian. Il est prévu depuis longtemps que nous ferons ainsi, ce n'est pas nous qui allons changer les choses. Si tu n'es pas content, tu te plaindras aux Bynthiens. C'est eux qui se chargent des prophéties, pas moi.
- Je disais ça comme ça, Jillian ! protesta Kylian.
Le regard polaire que lui lança la jeune femme le dissuada de continuer plus loin son explication. Ils se remirent donc en selle et reprirent la route. Avec les lieues, le caractère d'Ivrian ne s'améliora pas ; la présence des montagnes avait sur son humeur plutôt joyeuse et insouciante des effets désastreux. A la fin, seule Hermine, la plus conciliante des deux soeurs, arrivait encore à la supporter et à écouter à longueur de journée ses récriminations à propos de " cette chaîne idiote de montagnes qui ne trouvait rien d'autre à faire qu'écraser les gens de son insupportable supériorité ". La jeune fille enroulait une mèche cuivrée autour d'un de ses doigts et ne disait rien.
- Comment fait-elle quand elle est à Ky Rann ? demanda Garouk à Jillian.
- La Forteresse a des pièces où il n'y a pas toujours de fenêtres, répondit la jeune femme en riant. Non, surtout, Ivrian a toujours une suite orientée à l'est. Ainsi, elle a vue sur la Ky Shar, mais pas sur les montagnes. Ça suffit généralement pour la remettre de meilleure humeur.
De sa place dans la colonne, Garouk entendait parfaitement bien la voix d'Ivrian qui montait graduellement dans les octaves. Il n'entendait presque jamais la douce voix d'Hermine.
- Dis, Jillian, demanda-t-il, frappé par une idée subite, si les jumelles croient qu'elles sont issues d'une expérience, comment peuvent-elles être princesses impériales ?
- C'est une lubie du frère de Meztli. Il adorait sa soeur et quand il l'a perdue, il n'a pas réussi à envisager une seule seconde de se marier. Les jumelles ressemblent beaucoup à leur mère et, quand elles eurent une quinzaine d'années, il leur a dit que, comme elles lui rappelaient sa soeur disparue, il en faisait ses nièces. Il a été obligé d'adopter un fils pour sa descendance. Maintenant, elles sont les cousines ou petites cousines de l'empereur actuel, mais leur oncle a stipulé qu'elles auraient droit au titre de princesses impériales jusqu'à la fin de leur vie et, qu'en cas d'absence d'héritier à la couronne, le trône leur reviendrait en toute légalité.
- Meztli était donc de la famille impériale ?
- Meztli était la soeur de l'empereur, Garouk.
- Comment prennent-elles le fait de ne pas avoir de parents ?
- Elles s'y sont habituées. C'était dur au début, mais le frère de Meztli a inventé toute une histoire comme quoi il voulait deux petites filles ressemblant à sa soeur défunte.
- Il faudrait leur dire la vérité, je pense.
- Va expliquer ça à Val.
La veillée fut la même que toutes celles qui avaient précédé ; Ivrian était proche de la crise de nerfs et ce fut Kylian qui la consola : la présence des montagnes la déprimait plus qu'on ne pourrait le dire. Tout le monde se coucha d'humeur morose. Gorneval et Jillian furent les derniers à rester debout. Le métamorphe s'approcha des jumelles et remonta la couverture jusque sous leur menton. Il les regarda longuement puis remarqua :
- Elles ont toujours leur larme au coin des yeux.
- Comme Meztli, répondit doucement Jillian.
- Oui, comme Meztli, répéta douloureusement Gorneval.
- La douleur ne s'est pas atténuée ?
- Comment peux-tu me demander ça ? fit Gorneval avec violence, le regard toujours fixé sur la larme au coin des yeux d'Hermine.
- Tu devrais leur dire, Val.
- Leur dire ? A quoi bon ? Pourquoi leur annoncer qu'elles ont comme tout le monde un père et une mère, mais que leur mère est morte ? Maintenant, elles sont habituées à leur statut, je ne veux pas les faire souffrir de ne pas avoir de mère.
- Ne crois-tu pas que Meztli serait contente de savoir que ses deux filles pensent à elle ?
- Non. Elle serait d'accord avec moi. Va dormir, Jilly.
Obéissante pour une fois, Jillian alla s'allonger sous sa couverture. Longtemps, entre ses yeux mi-clos, elle regarda son frère à la posture douloureuse, à moitié penché sur les jumelles, et elle ne s'endormit que lorsqu'elle entendit enfin un sanglot s'échapper des lèvres de Gorneval.
Ils arrivèrent enfin en Kysharie. Ce n'était pas très difficile de le constater : partout, ils rencontraient des troupeaux de bétail ou de chevaux, encadrés des gardians, tous vêtus de cuir noir, les cheveux courts, ou alors, avec la queue de cheval pareille à celle de Lukyan. Kylian en salua plusieurs, mais aucun ne lui rendit son salut. Quand Takander en fit la remarque, Jillian lui expliqua que c'était normal.
- Kylian revient chez lui. Tant qu'il n'aura pas revu son père, il ne sera pas considéré vraiment comme étant de retour, donc les autres ne le saluent pas. Par contre, ils devraient saluer Lukyan. Je suis étonnée qu'ils ne le fassent pas, ajouta-t-elle en fronçant les sourcils.
- C'est normal, Jillian, répondit Lukyan de l'arrière de la colonne. Quand un Kyshar rentre chez lui, on ne salue personne en sa présence, même un autre Kyshar. C'est la coutume.
- Stupide, grogna Gorneval entre ses dents. Ce n'est pas le duc de Ky Sylrann qui aurait instauré une coutume aussi idiote.
Ivrian se tortillait sur sa selle ; visiblement, la peur seule que lui causait la présence des montagnes n'était pas entièrement responsable de cet état de nervosité exacerbée. Elle redoutait quelque chose d'autre et tous purent s'en rendre compte. Elle avait même essayé de chevaucher en fermant les yeux, mais avait pesté en kushite ancien avant de rouvrir les yeux.
- Je sens quand même leur présence, expliqua-t-elle à Hermine. Et j'ai l'impression que, quand j'ai les yeux fermés, elles peuvent m'atteindre sans que je puisse y faire quelque chose.
Ses yeux bruns pailletés d'or étaient hâves et de grands cernes bleuâtres se dessinaient sous ses paupières. La plupart compatissait à sa phobie, mais se gardait bien de lui montrer, de crainte d'une rebuffade acerbe. Takander poussait de gros soupirs en attendant le moment où Ivrian redeviendrait la jeune fille aimable et drôle qu'elle était d'habitude. Garouk ne s'en était pas aperçu immédiatement, mais ne plus entendre le rire d'Ivrian lui manquait ; ses remarques ironiques étaient toujours drôles et son personnage de gamine insupportable et désinvolte faisait plutôt sourire.
Garouk finit par en avoir sérieusement assez de l'entendre vitupérer à longueur de journée en kushite ancien - il la soupçonnait de dire en cette langue des insultes que les autres n'étaient pas censés entendre - et il sentait bien que l'humeur des autres s'en ressentait aussi. Il fit remonter la colonne à son cheval alezan et fit signe à Hermine qu'elle pouvait aller rejoindre Gorneval. La jeune fille rousse n'avait pas bonne mine non plus ; elle devait faire des efforts de plus en plus violents pour ne pas prendre Ivrian par les épaules et lui donner deux bonnes gifles qui lui auraient peut-être remis les idées en place.
- Je peux savoir pourquoi tu en veux tellement à ces montagnes, Ivrian ? demanda Garouk.
La jeune fille lui lança un regard noir, mais, bien sûr, il ne le vit pas.
- Elles sont vraiment trop hautes, Garouk, expliqua-t-elle en essayant de prendre un ton calme, les dents serrées. Ça devrait être interdit.
- Mais qu'est-ce que leur taille peut bien te faire ? s'étonna le jeune homme. On m'a toujours parlé de l'océan comme quelque chose d'immense ; est-ce que tu en as peur quand tu es dessus ?
- Non, Garouk, mais il ne me domine pas comme le font ces montagnes.
- En fait, le problème, c'est que tu n'aimes pas avoir l'impression que quelqu'un t'est supérieur d'une quelconque manière et c'est pour ça que tu empoisonnes la vie de tout le monde depuis quinze à vingt jours.
Ivrian eut un rire un peu contraint.
- Dit comme ça, ça a l'air un peu stupide, hein ? admit-elle.
- Pas un peu, Ivrian. Beaucoup.
- Merci, Garouk, répondit-elle d'un ton sarcastique. J'avais besoin de ça, maintenant.
- J'adore rendre ce genre de services, fit Garouk d'un ton candide. Bon, puisque nous connaissons la source du problème, on va essayer de s'y attaquer. Nous disions donc que tu en voulais aux montagnes parce qu'elles te dominaient de beaucoup trop haut.
- C'est à peu près ça, grinça Ivrian et elle jeta un regard de rancune à la Chaîne de la Kyshar.
Garouk leva son visage et prit un air méditatif.
- Imaginons que tu t'équipes de cordes et de piolets, d'un bon guide et que tu escalades la plus haute montagne de cette très haute chaîne. Tu arrives au sommet et tu peux regarder le monde du haut de ton point de vue. Tu as dépassé la montagne puisque tu es debout sur son sommet ; on est d'accord ?
- Oui, fit Ivrian et il lui sembla que sa voix avait l'air déjà un peu moins irritée.
- Merveilleux. Donc, toi, tu peux vaincre la montagne, puisque tu peux aller plus haut qu'elle encore. Tu peux même la vaincre quand tu le veux. Si tu ne l'as pas encore fait, c'est parce que tu as mille autres choses à faire, plus urgentes, et que tu n'as pas de temps à lui consacrer. Alors elle croit qu'elle te fait peur et elle te donne l'impression de t'écraser de sa morgue. Mais en fait, tu la méprises : tu ne t'intéresses pas à elle et même, tu la dédaignes. Elle se sent frustrée et c'est pour ça qu'elle essaie de te dominer de cette manière. Comme tu n'es pas méchante, tu joues son jeu et tu la laisses croire que tu as trop peur pour la défier, ce qui est faux, bien entendu. En fait, tu sais pertinemment que tu peux le faire et que tu peux la vaincre, mais ça ne t'intéresse pas de le faire.
Ivrian le regarda avec incrédulité.
- Tu veux dire que je n'ai pas peur d'elle ? Que je fais tout ça inconsciemment ?
- Bien sûr ! Tu ne l'avais pas compris ?
- Mais peut-on faire tant de choses inconsciemment ?
- Dis-moi, tu réfléchis à chaque fois que tu respires ?
- Non, bien sûr, sinon j'oublierais constamment de le faire.
- Et pourtant tu respires. Tu le fais inconsciemment, sans y attacher d'importance. Eh bien, là, c'est pareil.
Ivrian respira à fond et soudain, elle se sentit beaucoup mieux.
- Tu veux que je te dise, Garouk ? Tu es absolument merveilleux !
- C'est bien ce que je pense, mais j'évite de le dire, répondit modestement le jeune homme. Je ne sais pas pourquoi, mais les gens n'aiment généralement pas ceux qui sont merveilleux.
Ivrian se pencha, lui entoura le cou de ses bras et lui donna un gros baiser sonore sur la joue.
- Ça, c'est gentil, fit Garouk. Bon, maintenant, ça va mieux ?
- Beaucoup mieux, affirma Ivrian et ses yeux bruns pétillaient de gaieté.
Garouk lui fit un sourire encourageant et reprit sa place dans la colonne. Gorneval ne mit pas longtemps à venir le trouver alors que le rire d'Ivrian résonnait clair, se mêlant à celui des jumelles.
- Je peux savoir ce que c'est que tout ce charabia à propos de la montagne qui domine et autres sornettes ?
- Val, elle faisait une fixation à ce sujet. J'en avais plus qu'assez de l'entendre râler sur tous les tons. Comme elle en était venue au point de personnifier la montagne, je me suis dit que parler de défi ne pouvait que lui faire du bien.
Gorneval regarda le jeune homme avec un drôle d'air.
- On peut dire que tu es plus futé que tu en as l'air, fit-il sobrement.
- Merci, Val, mais j'aimerais vraiment que tu fasses tes compliments autrement que par des moyens détournés.
La route continua et l'atmosphère se détendit sensiblement. Le rire d'Ivrian résonnait de nouveau, clair et haut, et tout le monde s'en sentait beaucoup mieux. La jeune fille jetait de temps en temps des regards malicieux vers la montagne et sa peur irraisonnée semblait s'être totalement évanouie. Les veillées devinrent plus enjouées et les dernières lieues se firent en gaieté.
La Forteresse de Kysharie apparut enfin. Elle ressemblait un peu à celle d'Alcyol, mais bien sûr, aucun des deux pays ne l'aurait admis. La Forteresse était massive, aux hautes murailles de pierre, mais le portail qui s'y trouvait n'avait rien à voir avec celui d'Alcyol. C'était un lourd portail de bronze et quatre hommes vêtus de cuir noir se trouvaient devant le portail, la mâchoire en avant, l'air belliqueux. Kylian prit un peu d'avance et se présenta au portail, sans ouvrir la bouche. A sa vue, les gardes ouvrirent de grands yeux et ils hurlèrent un ordre pour faire ouvrir la porte. Les battants tournèrent lentement sur leurs gonds et les gardes se mirent en rang pour laisser passer le petit groupe. Ivrian avait repris son sérieux et elle regardait autour d'elle avec une expression attristée.
Au milieu de Ky Rann, la Forteresse, se dressait le palais du roi de Kysharie, un monument aux lignes lourdes et solides, peu élégantes, mais visiblement faites pour soutenir un siège. Jillian décrivait tout cela à Garouk d'une voix brève et précise et elle ajouta que la Forteresse était plutôt le nom que l'on donnait au palais.
- Les Kyshars n'ont pas grand-chose à faire des villes, expliqua-t-elle. Ce sont plutôt des nomades qui passent leur temps à cheval. Les villes, comme Ky Rann ou Ky Vyrann, servent surtout de relais ou bien ce sont des artisans qui s'y installent. Par exemple, Ky Vyrann est réputée pour sa sellerie. Des Kyshars traversent le pays en entier pour venir acheter une selle à Ky Vyrann.
De nouveau, Kylian se présenta devant les portes, toujours silencieux, et les gardes le laissèrent entrer avec une nuance de respect.
- Avant l'accueil officiel, dit Kylian une fois que les portes se furent refermées derrière eux, nous allons d'abord voir mon père. Un enfant qui rentre de sa quête commence toujours par aller voir son père.
Il se dirigea vers une petite salle juste à côté de la grande salle du trône. La pièce était exiguë, certes, mais elle était accueillante. Un homme se trouvait dans un fauteuil, tourné vers la porte, à côté du feu. Il était vêtu de cuir noir, bien sûr, comme tous les Kyshars, et il semblait avoir également la haute taille de ce peuple. Par contre, il ne fallait pas le qualifier de maigre ; ce mot-là ne suffisait pas pour le décrire. Il était plutôt décharné que maigre. Sa peau était collée sur ses os et ses yeux noirs paraissaient immenses dans le visage squelettique.
- Bienvenue, Kylian. Ainsi ta quête est achevée, fit l'homme d'une voix douce et basse.
- Oui, père. Comme il était prévu de tout temps, mon cousin est venu et l'événement a eu lieu.
- As-tu appris, mon fils ?
- Je le crois, père.
- As-tu été humilié à la cour du Sicyol ?
A ce souvenir, le visage anguleux de Kylian se crispa légèrement, puis il retrouva son impassibilité coutumière.
- Oui, père, répondit-il d'une voix parfaitement atone.
- Qu'es-tu devenu, alors, mon fils ?
- Un tueur et un assassin, père ; un homme sans pitié.
- Je le craignais, en effet. Mais puisque tu as accompli ta quête, tu pourras être présenté demain.
Il se tourna alors vers les autres et son regard se posa sur Ivrian.
- Petite mère, fit-il avec douceur. Tu as veillé sur Kylian.
- Oui, mon petit, autant que je l'ai pu. Je me suis éloignée quand il le fallait, pour qu'il puisse passer les épreuves seul.
- Veux-tu bien me bénir, petite mère ?
- Bien sûr, mon petit.
Elle s'approcha, dessina du bout de son index un signe sur le front du Kyshar, prit sa tête entre ses mains, puis prononça la bénédiction en kushite ancien. Cela fait, elle le serra entre ses bras avec désespoir.
- Mon petit, mon tout petit, dans quel état es-tu ? gémit-elle en penchant la tête vers lui.
Personne ne réagit devant les larmes qui coulaient sur les joues d'Ivrian. La jeune fille se contrôla et recula en essuyant rapidement ses larmes.
- Que t'ont-ils fait ?
- Rien, petite mère, tu le sais bien.
- Ils te tuent à petit feu ! Tu ne manges toujours pas, je suppose ?
- Je n'ai pas goût à grand-chose, admit le Kyshar.
Il regarda le petit groupe figé.
- Je suis Selvian, le père de Kylian. Et je suis également Rian IV, roi de Kysharie. Où est le cousin de Kylian, mon neveu ?
Garouk s'approcha avec timidité.
- C'est moi.
- Tu es donc Ouryan, n'est-ce pas ?
- Je préfère qu'on m'appelle Garouk, répondit-il.
- Et tu es aveugle.
- Oui, Majesté.
- Je suppose, Sire Gorneval et Dame Jillian, que si vous êtes là, c'est qu'il n'y a pas d'erreur.
Le frère et la soeur échangèrent un rapide coup d'oeil en pensant à ce que leur avait appris le faucon, mais ils décidèrent de rien en dire.
- Voyons, Selvian, fit Gorneval avec un petit rire. On ne va pas utiliser des Sire et des Dame depuis le temps que nous nous connaissons. Est-ce que je vous donne du Majesté, moi ?
- Bien sûr que non, Gorneval, mais vous êtes beaucoup plus vieux que moi et beaucoup moins respectueux.
- Merci, Selvian, répondit ironiquement Gorneval. J'avais besoin qu'on me le rappelle. Bon, vous comptez épiloguer longtemps à ce sujet ou vous allez présenter votre fils ?
- Enfin, Gorneval, vous ne savez pas le temps que ça prend pour préparer tout ça ? protesta Selvian.
- Eh bien, commençons tout de suite avant de perdre du temps ! Vous n'allez pas regarder tout le monde sous le nez, quand même ?
- Gorneval, je croyais que vous étiez pressé ? fit doucement Selvian. Kylian, conduis-les.
- Oui, père.
Le roi se leva avec difficulté de son fauteuil. Ivrian s'avança et le força à mettre son bras sur ses épaules.
- Laisse-moi t'aider, voyons, mon petit.
- Petite mère, il y a longtemps que tu aurais dû me laisser me débrouiller. Je ne suis plus un enfant, tu sais.
- Par rapport à moi, tu seras toujours un enfant, mon petit. Tu sais très bien que je suis bien plus âgée que toi.
- C'est quelque chose que je préfère ignorer, petite mère. Pour moi, tu resteras toujours une fraîche jeune fille. Va te préparer, maintenant, petite mère.
Elle fit quelques pas vers la porte, se retourna pour regarder le grand roi si maigre qui se déplaçait avec tant de mal et ses yeux exprimaient un désespoir indicible. Jillian entraîna Garouk au-dehors de la pièce et il se retrouva une fois de plus dans un baquet d'eau chaude.
Texte © Azraël 1997 - 2002.
Bordure et boutons Running horse silhouette, de Silverhair (modified)
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