Didon
Ecoute mes dernières paroles, peuple de Carthage !
Le feu apaisera mon coeur que la douleur ravage...
Ecoute-moi avant que ne vienne le temps des larmes :
Contre la race d'Enée, sans trêve levez vos armes,
N'acceptez jamais d'elle la moindre offre de paix,
Car mes cendres ne vous le pardonneraient jamais !
Souvenez-vous de moi, à l'époque de ma grandeur,
Quand je fondai ces murs qui firent mon bonheur !
Phéniciens, rappelez-vous mon sublime destin,
Mais chassez de vos mémoires quelle fut ma fin !
Pour que Carthage vive, il faut que Didon s'immole
Ainsi la paix reviendra visiter mon coeur qui se désole...
Prêtres de Pluton
Ô dieux du sombre royaume des morts,
Que vos voix se joignent à nos tristes accords !
Ô dieux de l'oubli, apportez-nous l'eau du Léthé
Pour qu'à son contact revienne la sérénité !
Entendez-nous, ô dieux du profond Tartare,
Et rendez la paix et le repos au coeur qui s'égare !
Didon
Sychée, mon époux ! Ah ! J'ai rompu mon serment
Et cet abandon et cette mort sont mon châtiment !
Las ! Dira-t-on que Didon aura faibli devant son destin ?
Il n'est plus temps d'hésiter ! La fierté guide ma main
Et doucement, la voix de Sychée me presse d'en finir !
Car pour une reine, c'est ainsi qu'il convient de mourir !
Anna
Ma soeur, ma tendre soeur ! Ah ! Quelle fut ta cruauté ?
Tu m'as dit de construire ce bûcher, pour t'apaiser,
Et cela signifiait ta mort ! Que ne m'as-tu appelée ?
De la même blessure, la même arme m'aurait frappée !
Dédaignes-tu la compagnie de ta soeur en la mort ?
Se peut-il que le Styx et l'Erèbe séparent notre sort ?
Didon
Pour que Carthage vive, il fallait que Didon s'immole...
Un sacrifice royal pour que mon âme enfin s'envole...
Las, ma soeur, ne pleure pas ! Didon s'offre au bûcher
Pour que Carthage grandisse et puisse me venger !
Ah ! Quel est ce cri ? Ce cri ! "Carthage doit être détruite !" !
Ah ! Ce cri me torture et me tue, moi, la femme séduite !
Anna
Ma soeur, ma soeur ! Ah ! Didon, qu'as-tu fait là ?
Némésis, entends mon cri sur son corps qu'entoure le trépas !
Que la mort de la reine Didon ne reste pas impunie !
Que ma malédiction poursuive Enée comme une infamie !
Ah, Didon, ma soeur ! Pourquoi m'as-tu écartée de ta fuite ?
Tu t'es immolée pour ta cité, mais Carthage sera détruite !
Prêtres de Pluton
Ô dieux du sombre royaume des morts,
Que vos voix se joignent à nos tristes accords !
Ô dieux de l'oubli, apportez-nous l'eau du Léthé
Pour qu'à son contact revienne la sérénité !
Entendez-nous, ô dieux du profond Tartare,
Et rendez la paix et le repos au coeur qui s'égare !
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